Iourievna revenait de « là-bas »
« Encore !
Mais tu passes ta vie chez Susan maintenant, ma parole !
Elle a jeté
son sac sur son lit.
‒ N’empêche que tu sais quoi ? Ben, elle l’a fait, Heather S. Elle a réclamé une réunion du conseil des mères. Même qu’elles se demandaient toutes pourquoi, vu qu’apparemment il ne s’était rien passé de spécial. Qu’elles n’avaient en tout cas entendu parler de rien.
‒ Ce
sera quand ?
‒ Ça a
déjà eu lieu. Avant-hier.
‒ Avant-hier ?
Mais elle nous a rien dit, maman.
‒ Elle
nous dit pas tout. Et puis là, elle devait pas trop avoir envie. Parce que
c’est des mères justement qu’il a été question. Et elle n’a pas mâché ses mots,
à ce qu’il paraît, celle de Susan. Que punir leurs filles et leurs fils, quand
ils l’avaient mérité, c’était bien. C’était même très bien. Indispensable pour
en faire des adultes dignes de ce nom. Mais ce qu’il fallait aussi, c’était que
les parents s’interrogent sur leurs propres responsabilités, qu’ils se
demandent si leur comportement ne laissait pas à désirer, s’ils ne donnaient
pas parfois, sinon souvent, le mauvais exemple à leurs enfants et s’ils n’auraient
pas mérité, eux aussi, de temps à autre une bonne correction pour les remettre
dans le droit chemin. Ça a évidemment tout aussitôt suscité un concert de
protestations indignées. Non, mais et puis quoi encore ? Elle n’allait
vraiment pas bien, elle, hein ! Elle n’a pas insisté. Elle s’est contentée
de leur demander de réfléchir. Le plus honnêtement possible. Et la réunion a
tourné court. Seulement, dès le lendemain matin, elle a reçu la visite
d’Angélique F., la mère d’Alexia, qui s’était tournée et retournée toute la
nuit dans son lit pour arriver à la conclusion que oui, si sa fille avait fait
preuve d’autant de légèreté en se laissant filmer pendant ses ébats, elle y
était très certainement pour quelque chose. Parce qu’elle, de son côté… Elle a
longuement tourné autour du pot, mais elle a fini par avouer à Heather S. que
c’était tout un défilé de types qu’il y avait eu, chez elle, ces derniers
temps. « Quatre. Quatre en moins d’un an. C’est que… je suis toute seule
et j’ai trop envie d’avoir quelqu’un. Alors je vais trop vite. Je m’emballe. Je
me persuade que c’est le bon. Que c’est forcément le bon. Je le ramène à la
maison. C’était pas le bon du tout en fait. Et retour à la case départ. Je ne
m’étais pas jusqu’ici vraiment posé la question, mais, pour Alexia, oui, vous
avez raison, ce doit être particulièrement déstabilisant. » « Ça,
c’est le moins qu’on puisse dire ! Bon, ben maintenant vous savez ce qu’il
vous reste à faire. Pour le bien de votre fille. Et pour le vôtre. » « Oui,
mais… » Mais attendre d’être sûre avant d’introduire un nouvel amoureux
chez elle, elle avait peur de ne pas y arriver. Parce qu’elle n’avait pas
beaucoup de volonté et que se réveiller, jour après jour, toute seule dans son
lit le matin, c’était au-dessus de ses forces. Elles ont discuté près de trois
heures toutes les deux. Trois heures au terme desquelles Angélique F. a
finalement pris les meilleures résolutions du monde et accepté d’être punie, de
la main d’Heather S. si elle ne tenait pas les engagements qu’elle avait pris
vis-à-vis d’elle-même. Susan, elle, elle est convaincue qu’elle ne les tiendra
pas. « Rien qu’à la voir, cette femme, t’as pas le moindre doute
là-dessus. » Et qu’il y en aura d’autres, des femmes, qui viendront se
confier à sa mère. Et lui demander de les aider. « Parce que comment elle
sait convaincre ! Bon, mais ça, c’est normal. C’est Dieu qui l’inspire.
Qui lui souffle comment ramener à lui les brebis égarées. »
Le
lendemain, on revenait d’aller faire quelques courses quand on est tombées par
hasard, au coin de la rue, sur Cassandra et Flavie, deux filles de Sainte-Croix
qui sont aussi en BTS, tout comme nous, mais dans une autre section que la
nôtre. Elles avaient une tête, mais une tête ! Et elles étaient dans un
état !
« Qu’est-ce
qui vous est arrivé ?
‒ Rien.
‒ Bien
sûr que si ! Vous vous êtes fait agresser, c’est ça ? Si c’est ça,
faut aller à la police. Faut porter plainte. On vous accompagne si vous voulez.
C’était pas
ça, non.
Ben, c’était
quoi alors ?
Elles ont
fini, à force qu’on les questionne, par cracher le morceau. Elles s’étaient
pris une fessée. Toutes les deux. Par Carole. Carole, c’est la cheffe des
compagnonnes scoutes, un groupe dont elles font partie.
‒ Et on
a pris cher.
‒ Tant
que ça ?
Cassandra a
regardé autour d’elle, nous a entraînées sous une porte cochère et a baissé
short et culotte.
‒ Ah,
oui, quand même !
Ses fesses
étaient d’un rouge uniformément flamboyant. Et toutes griffées.
‒ C’est
aux verges qu’on te l’a fait, hein ?
C’était ça,
oui.
On les
plaignait. Sincèrement.
‒ Parce
que les verges, ça, c’est un des trucs les pires qui soient.
Flavie,
elle, ne nous a pas montré son derrière.
‒ Mais
bon ! Il est exactement dans le même état.
Et ça avait
été quoi, la raison de cette correction ?
‒ Oh,
on a été idiotes.
‒ Oui.
On a voulu faire une blague à Christian F., le curé.
‒ C’est-à-dire ?
Oh, ben
c’est-à-dire que, comme elles faisaient partie de la chorale, avec tout le
groupe des compagnonnes scoutes, elles avaient accès à la sacristie. Et ça les
avait toquées, alors qu’elles s’y trouvaient seules, d’essayer de découvrir le
code du cadenas de l’armoire où sont rangés les ornements sacerdotaux. Après
quelques essais infructueux, elles y étaient enfin parvenues. La tentation
était trop forte : elles avaient changé le code. Et quitté les lieux en
riant comme deux petites folles. Ce qui n’avait pas échappé à Carole, leur
cheffe, qu’elles avaient croisée en sortant de là. Évidemment, quand il avait
voulu dire sa messe, le curé s’était trouvé dans l’incapacité d’ouvrir
l’armoire. Il avait fait appel à un serrurier qui avait été formel : le
code avait été modifié. Comme elles avaient été vues sortant hilares de la
sacristie, les soupçons s’étaient tout naturellement portés sur elle. Carole
n’avait eu aucun mal à leur faire avouer leur forfait. Et elle avait décidé de
les punir.
‒ Devant
les autres filles ?
Flavie a
baissé la tête.
‒ Devant
elles, oui.
J’ai
brusquement réalisé.
‒ Eh,
mais c’est qu’on a cours de natation demain. Elles seront pas parties, vos
marques. Et en maillot…
Elles ont
blêmi.
‒ On se
fera dispenser. Si on s’y prend bien, sûrement qu’ils voudront, nos parents.
On les a
regardées s’éloigner. Et Iourievna s’est faite sceptique.
‒ Oui,
ben alors ça, ça m’étonnerait ! Je les connais leurs parents. T’inquiète
qu’elles y seront demain à la piscine.
Elle a sorti
son portable.
‒ Qu’est-ce
tu fais ?
‒ J’appelle
Coralie. Elle en fait partie, elle aussi, de leur truc scout, là. Qu’on ait un
autre son de cloche.
Elle ne
demandait pas mieux que d’en parler, Coralie. Au contraire. Et même que de
montrer. Parce que, bien sûr, ça avait été filmé, tout ça. Et qu’elle en avait
une copie.
‒ On
peut venir ?
Évidemment
qu’on pouvait. Évidemment !
‒ Théo
aussi ?
‒ Théo
aussi…
Je l’ai
appelé et, un quart d’heure plus tard, on était tous les quatre confortablement
installées sur le canapé de Coralie, un verre de coca à la main.
‒ On y
va…
Au tout
début, on se trouvait, sur l’écran, dans leur local scout, au beau milieu d’un
groupe de filles assises sur des bancs et toutes uniformément vêtues de
chemises vertes et de shorts marron. Tout excitées, elles y allaient de leurs
commentaires en jetant des regards appuyés à Flavie et Cassandra qui, à l’écart
près de la fenêtre, manifestement très mal à l’aise, faisaient mine de regarder
dehors et de ne pas leur prêter la moindre attention. Elles s’en donnaient à
cœur-joie.
‒ Je
sais pas vous, mais moi, comment ça me fait trop plaisir de me dire que je vais
les voir s’en prendre une.
‒ Oh,
oui, alors ! Des prétentieuses comme ça !
‒ Toujours
à répéter que c’est elles qui vont être cheffes parce que personne d’autre a
l’étoffe pour…
‒ Elles
sont imbuvables, oui !
La porte
s’est ouverte et cinq autres filles ont fait leur apparition sous les
applaudissements et les acclamations en brandissant triomphalement deux
bouquets de verges faits de petites branches de bouleau.
‒ On
les a choisies avec amour.
Et elles ont
éclaté de rire.
La cheffe a
appelé Flavie et Cassandra, les a obligées à venir se placer devant leurs
camarades et à les regarder en face.
‒ Vous
vous êtes comportées d’une façon scandaleuse. Absolument scandaleuse. Vous avez
déshonoré la chemise que vous portez. Alors vous allez la retirer.
Exécution !
Elles ont
marqué un temps d’hésitation. Et puis elles ont obéi.
‒ Donnez-les-moi !
‒ Bien !
Et maintenant, comme le règlement que vous avez signé le stipule, vous allez
être punies. Vous l’avez amplement mérité. Vous n’y voyez pas d’objection,
j’espère… À moins que vous ne préfériez être définitivement exclues.
Elles ne
voulaient pas, non ! Surtout pas.
‒ Bien.
Alors vous vous déshabillez. Et complètement. Tout. Vous enlevez tout.
Elles ont
voulu se détourner pour le faire, mais elle les a sèchement rappelées à
l’ordre.
‒ Non,
non ! Tournées vers nous.
D’abord le
short. Puis, en baissant la tête, le soutien-gorge. Il y a eu deux ou trois
rires étouffés. Elles ont aussitôt précipitamment ramené leurs mains devant
leurs poitrines.
J’ai pressé
le genou de Théo. Il adore quand les filles ont des réactions de pudeur.
Surtout lorsqu’il sait qu’elles devront de toute façon finir par montrer ce
qu’elles s’efforcent maladroitement de cacher.
Les rires
ont redoublé.
‒ Eh
bien, continuez ! Qu’est-ce que vous attendez ?
Elles se
sont exécutées. Elles ont baissé leur culottes, blanche à petites fleurs roses
pour Cassandra, verte à motifs ajourés
pour Flavie. Elles en sont sorties. Un pied après l’autre. Et vite, le plus
vite qu’elles ont pu, elles sont allées, là aussi, se couvrir en bas de leurs
mains. Encore des rires. Moqueurs. Délibérément offensants.
Théo était
manifestement aux anges. Je lui ai déposé un petit baiser dans le cou.
‒ Je
suis sûre que tu bandes.
Je suis
allée vérifier, du bout des doigts, à travers son pantalon.
Et
évidemment ! Évidemment !
Je me suis
pressée contre lui.
‒ Profites-en
bien, mon amour ! Profites-en à fond.
Coralie a
coulé un discret regard en coin dans notre direction.
Sur l’écran,
la cheffe a exigé.
‒ Enlevez
vos mains ! Tout de suite. Allez !
Et elles les
ont abandonnées, ballantes, le long de leurs cuisses.
Elle a
appelé.
‒ Justine !
Maeva ! Venez ici !
‒ Nous ?
‒ Ben
oui, vous ! Pas l’empereur d’Éthiopie.
Elles se
sont approchées. Elle leur a tendu les verges.
‒ C’est
vous qui allez punir vos camarades.
Elles l’ont
regardée, incrédules. Et puis les deux filles. Et encore une fois leur cheffe.
Iourievna a
constaté.
‒ Eh,
mais c’est qu’elles nous l’ont pas dit ça ! Soi-disant que c’était
Charlotte qui le leur avait fait.
Coralie a eu
un petit rire haut perché.
‒ Elles
n’allaient pas s’en vanter. Surtout que ce sont les deux plus jeunes de la
troupe, Justine et Maeva. Comment ça doit être vexant pour elles !
Cassandra a
fait une ultime tentative.
‒ C’était
pas méchant. On avait rien contre lui, le père Christian F. C’est juste que…
La cheffe
l’a interrompue.
‒ Pour
toi qui as été l’instigatrice de cette désopilante plaisanterie, ce sera
cinquante coups. Et pour Flavie qui n’a été que complice, quarante.
C’est par
elle, Flavie, qu’elle a voulu que Justine et Maeva commencent.
‒ Approche !
Elle l’a
fait se pencher à l’équerre sur une table et offrir docilement sa croupe à ses
deux petites camarades.
‒ Allez,
les filles, à vous de jouer !
Elles lui
ont fait rectifier sa position.
‒ Un
peu plus en avant. Encore ! Avance, mais avance ! Ton bassin. Là,
comme ça, oui !
Et elles lui
ont d’abord longuement caressé les fesses avec les verges. Entre les fesses.
Que Flavie a crispées. Qu’elle a serrées. Qu’elles l’ont obligée à écarter.
‒ Encore !
Allez !
Iourievna a
soufflé.
‒ Regarde
leurs têtes ! Non, mais regarde leurs têtes ! Comment elles prennent
leur pied, ces deux filles !
Sur un signe
de leur cheffe, trois autres scoutes sont venues à leur rescousse pour
maintenir solidement Flavie bien plaquée contre la table par les bras et par
les épaules.
‒ Prête ?
Et elles ont
tapé. En alternance. Chacune leur tour. Des coups sourds qui se sont tout de
suite inscrits dans sa chair en longues griffures rosâtres. Qui l’ont fait
trépigner, se débattre, gigoter dans tous les sens. Ce qui a fait rire celles
qui la tenaient. Qui ont assuré leur prise plus solidement encore. Et qui se
sont moquées d’elle.
‒ Vas-y !
Vas-y ! Démène-toi ! Encore ! Mieux que ça ! Comme ça,
oui ! C’est bien plus rigolo.
Quant à
Justine et Maeva, elles étaient complètement déchaînées. Elles tapaient tout ce
qu’elles savaient.
‒ On va-t’en
faire passer l’envie, nous, tu vas voir !
Flavie
hurlait et pleurait tout ce qu’elle savait.
‒ S’il
vous plaît ! Oh, s’il vous plaît !
‒ Quarante…
Elles se
sont arrêtées et l’ont lâchée. À regret.
Elle est
allée se réfugier dans un coin de la salle.
Et alors ça
a été au tour de Cassandra qui s’est mise à résister de toutes ses forces en
hurlant qu’elle ne voulait pas.
‒ Lâchez-moi !
Mais lâchez-moi !
Elle s’est
roulée par terre. Toutes celles qui s’approchaient pour la forcer à se relever,
elle s’efforçait de les mordre tout en distribuant de grands coups de pied au
hasard dans tous les sens. Il a fallu qu’elles se mettent à huit pour y
parvenir et pour réussir à la mettre et à la maintenir en position.
‒ Alors
là, toi, tu vas le sentir passer !
Et Justine a
cinglé. Maeva lui a aussitôt emboîté le pas. Elles tapaient… Elles tapaient…
Elles y mettaient tout leur cœur. Et Cassandra hurlait. Elle hurlait sans
discontinuer.
‒ Si tu
crois que c’est en braillant que tu vas nous impressionner…
Et elles en
ont rajouté une couche. Plus fort. Plus déterminé. Cassandra était en nage.
Elle se tordait de douleur, le derrière écarlate sur toute sa surface et
piqueté d’une multitude de petites écorchures provoquées par les aspérités des
branches de bouleau. Et elle continuait à se débattre essayant désespérément
d’échapper aux filles qui la maintenaient et qui riaient tant et plus des
efforts qu’elle déployait en vain pour y parvenir.
‒ Cinquante !
Ça s’est
arrêté.
À la grande
déception de Théo.
‒ Oh,
non, pas déjà !
Laura a
proposé.
‒ Oh,
mais on remet au début si tu veux.
Ce qu’elle
s’est empressée de faire.
Elle nous a
embrassée tous les deux dans un même regard.
‒ Et après… Après il y a une chambre d’amis, si vous voulez
Et Iourievna ? On la connait
Il y a un début à cette série
et l'épisode précédent : chapitre 35 acte 3
Bonjour François,
RépondreSupprimerVoilà quelques scoutes qui ont bien des choses à se reprocher. Empêcher le prêtre de faire son office, mon dieu, pardonnez-leur, elles ne savent pas ce qu'elles font !
Elles s'en mordront les doigts. En tant que scoutes et futures cheffes, les deux demoiselles ont un devoir d'exemplarité, ce qu'elles n'ont pas eu.
De plus, avec la fessée, elles devront aller à la piscine dès le lendemain. Quelle humiliation, devant les copines de classe...
Bref, vous l'aurez compris, dans cette région, les blagues les plus courtes sont les meilleures, encore faut-il bien choisir la victime, sinon, aie, les fesses.
Les verges doivent être terribles, car en plus de cingler les chairs, elles les griffent et les marques restent un peu plus de temps. C'est pas que ce soit gravissime, mais bien douloureux et tenace. Ca leur servira de leçon.
Amitiés.
Elena.
Bonjour Elena,
SupprimerChez les scoutes on ne plaisante pas avec les plaisanteries qui s'en prennent au religieux. On ne scie pas la branche sur laquelle on est assis. D'où le caractère appuyé de la correction infligée à nos deux contrevenantes, lesquelles ont d'ailleurs fait preuve d'infiniment de légèreté. Quand on aspire à un poste de responsabilité on ne se met pas dans des situations comme celles-là. Comment pourront-elles désormais, après ce qui leur est arrivé, avoir une quelconque autorité sur leurs troupes? L'avenir dont elles rêvaient, à l'intérieur du groupe, est très sérieusement compromis. Et ce sera sans doute là leur principale punition.
Amicalement.
François